La Reine Amélie au Chesnay
Reine déchue du Portugal, c’est après une longue vie faite d’exils que la Reine Amélie s’installe au Chesnay, non loin de l’église Saint Antoine.
Définitivement installée chez nous, elle va se signaler par sa piété et sa participation à la vie de notre ville et de sa paroisse: elle préside des cérémonies de remises de prix scolaires et d’activités du patronnage de la paroisse du Chesnay, elle organise tous les deux ans la kermesse de la paroisse dans le parc de sa propriété.
Son attachement à la paroisse est tel qu’elle lui fait le don de son grand manteau de cour, dans lequel sont taillées des chasubles. Elle offre également la monumentale statue de Saint Antoine de Padoue.
Lors de la seconde guerre mondiale, la reine Amélie refuse le refuge à Lisbonne que le gouvernement du Portugal (Salazar) lui propose. Le gouvernement portugais décide alors d’étendre l’extraterritorialité qui concerne les bâtiments diplomatiques à sa maison chesnaysienne. Sa demeure est un refuge pour les Chesnaysiens menacés par les Allemands qui n’oseront jamais en forcer l’entrée.
L’affection qui la lie aux Chesnaysiens est très réciproque: à sa mort en 1951, ceux-ci se pressent pendant plusieurs jours au chevet de la reine défunte.
Biographie de la Reine Amélie de Portugal
– 1865: naissance en exil à Twickenham (UK), fille de Philippe et Marie-Isabelle d’Orléans, arrière-petite fille de Louis Philippe, dernier roi des Français.
– 1871: retour en France, après 6 ans d’exil (chute du Second Empire et perspective d’un rétablissement monarchique prochain).
– 1886: fiançailles en France puis mariage au Portugal avec Charles de Bragance, héritier du trône du Portugal. Ses fiançailles, particulièrement fastueux, provoquent l’irritation et l’inquiétude des Républicains qui votent une loi d’exil de toute la famille de France dans la foulée.
– 1889: son mari monte sur le trône. Début des problèmes dans le couple: Charles 1er est un mari volage. Elle reste fidèle malgré tout. Deux enfants naissent: Luiz et Manoel.
Le Portugal traverse une grave crise économique (pays très rural marqué par des sécheresses et tremblements de terre), moral (sentiment de déclin fort) et social (incapacité à réformer, société figée dans les anciennes “castes” qu’une nouvelle bourgeoisie républicaine et les milieux anarchistes marins et ouvriers veulent faire tomber). Amélie s’adonne totalement aux œuvres sociales (création de dispensaires, d’écoles, d’orphelinats, visites aux plus pauvres): elle est aussi adorée que son mari est raillé par des Portugais qui lui reprochent ses conquêtes et son peu d’intérêt pour régner (il adore la mer).
– 1908: assassinat dans les rues de Lisbonne et alors qu’ils sont en landeau (calèche ouverte) de Carlos 1er et de l’héritier du trône Luiz. Seul le courage d’Amélie (femme imposante…) empêche les anarchistes d’assassiner Manoel et Amélie.
– 1910: après deux années de règne erratique (Manoel ne sait pas gouverner, ne veut pas régner et n’ose pas réformer), la République est proclamée après un coup d’Etat à Lisbonne. Amélie échoue à gagner le Nord du Pays, monarchiste, pour continuer la lutte. Exil en Angleterre à Twickenham.
– 1914-1918: Amélie est au chateau de Randan (Auvergne) qui appartient à ses cousins Boubon-Montpensier (des Orléans) transformé en hôpital dans lequel elle sert.
– 1921: chassée d’Angleterre par son propriétaire, elle achète le manoir de Bellevue au Chesnay. Par affection pour elle, les Chesnaysiens parleront désormais du château de la Reine Amélie.
– 1932: mort de son fils Manoel : d’un naturel indolent, littéralement vidé par le coup d’état, malheureux dans son mariage, Manoel meurt en Angleterre officiellement d’un oedème de la glotte (suicide?). Dans les années qui suivent, Amélie voit mourir la plupart de ses frères et sœurs et devient ainsi la figure tutélaire des Orléans.
– 1940: extraterritorialité sur sa maison par le gouvernement du Portugal après son refus de se réfugier au Portugal: “La France m’a accueilli lorsque j’étais malheureuse. Je ne l’abandonnerai pas dans le malheur.” Pétainiste, elle n’en transforme pas moins sa demeure en refuge pour les Chesnaysiens menacés par les Nazis (déportation et STO).
– 1949: voyage triomphal au Portugal. Elle et son fils ayant abandonné toute velléité de restauration monarchique, la République monarchique de Salazar lui réserve un accueil royal, les Portugais se souviennent de ses bienfaits et lui rendent des hommages tout au long de son périple. Elle refuse toutefois de s’y installer à demeure. Les souvenirs (notamment de l’attentat de 1908) sont trop forts.
– 1951: mort au Chesnay, villégiature dans laquelle elle aura passé la plus grande partie de sa vie. Les obsèques sont célébrées dans la cathédrale Saint Louis. Elle est enterrée à Lisbonne auprès de son mari, de ses deux fils et d’une fille morte jeune.